12.15.2011

Droit administratif 15.12.11

B) Polices administratives spéciales

1. Polices spéciales par leur but



Police dont le but n’est ni la sécurité, ni la tranquillité, ni la salubrité, ni la moralité, ni la dignité.

Exemples :

- Police du cinéma attribuée au ministre de la culture. Cela consiste à délivrer des visas d’exploitation aux films. Le but donné à la police par les textes correspond à tout but d’intérêt général.

- Police de l’affichage de la publicité et des enseignes attribuée au préfet par le code de l’environnement. Buts : esthétique et protection de l’environnement.

- Police de la chasse, prévue par le code de l’environnement, attribuée au ministre de l’agriculture. But : protection de la faune.

- Protection des monuments historiques attribuée au ministre de la culture par le code du patrimoine. But : protection du patrimoine culturel.



2. Polices spéciales par leur détenteur



Même but que la police administrative générale. Mais elles ont des détenteurs différents.

1ère autorité de la police administrative générale : le maire.

Ici, autres autorités que le maire et c’est en cela qu’elles sont spéciales : dérogation à la compétence du maire.

EX :

- Police des gares et des aérodromes. But = sécurité et tranquillité → préfet.

- Police des chemins de fer. But = sécurité des voies → ministre des transports.

- Police de l'expulsion (pour les étrangers dangereux) → ministre de l'intérieur + préfet.

Police des installations classées = établissements dangereux. But = sécurité → préfet.



3. Polices spéciales par leur procédure



Police spéciales qui ont le même but général que la police générale et qui sont confiées au maire comme la police générale.

Elles sont spéciales car elles sont soumises par les textes à des procédures spéciales.

EX : police des édifices menaçant, ruines, prévue par le code de la construction.

Cette législation remonte à une loi de 1898. Possibilité donnée au maire d'ordonner à des propriétaires de réparer ou de démolir leurs immeubles sur le point de s'écrouler.

Il faut qu'il y ait un péril, risque de tomber sur la voie publique.

Dans un premier temps, arrêt de péril (ordre de démolir la propriété) et si le propriétaire n'obéit pas, le maire peut exécuter d'office la démolition.

Point commun entre toutes ces polices spéciales : elles portent toujours sur un champ d'intervention beaucoup plus précis que la police générale.

La police générale peut porter sur n'importe quel objet à condition que l'un des 5 buts soit concerné.



§3. La distinction entre police administrative et service public



Il n'y a pas de différence car la police administrative est un SP.

Le doyen Vedel pensait qu'il y avait une différence. Il expliquait que la police administrative est une activité de prescription qui consiste à réglementer alors que le SP est une activité de prestation qui consiste à prendre en charge la satisfaction des besoins des administrés.

Mais ce n'est pas toujours vrai, il arrive parfois que les SP soient des activités de prescription.

EX : CE, 1942, « MONPEURT » : dans cette affaire, le CE affirme que des organismes, des comités d'organisation gèrent un SP. Ces comités imposaient des programmes de production aux entreprises. Ce service consistait en une activité de prescription et non pas de prestation.

La police administrative est un SP. La 1ère définition du SP correspond à une activité d'intérêt général (maintenir l'ordre public) gérée par une personne publique.

Est-ce un SPIC ou un SPA?

C'est un SPA d'après la méthode du faisceau d'indices :

  • L'objet de la police n'est pas comparable à une activité.
  • Mode de financement = impôt.
  • Modalités de fonctionnement = personnel de fonctionnaires.



Section 2 : La répartition des compétences en matière de police administrative

§1. Les titulaires des pouvoirs de police administratives

A) Les titulaires de polices spéciales



Ce peut être des maires, des ministres, des préfets. Un texte peut toujours confier un pouvoir de police spéciale à une autre autorité administrative.



B) Les titulaires de police générale



Liste plus limitée : aucune personne privée ne peut être détentrice d'un pouvoir de police administrative.

CE Sect., 1958, « CONSORTD AMAUDRUZ » : une commune avait voulu concéder à une personne privée 2 choses : le SP de l'exploitation de la plage et la police de l'ordre public sur la plage. CE → oui pour l'exploitation de la plage (ce n'est pas une police administrative) mais non à la délégation de la police. La police administrative générale ne peut être détenue que par une autorité administrative.

Les établissements publics non plus : les textes ne donnent pas le pouvoir de police générale aux directeurs des EP.

Les régions n'ont pas non plus le pouvoir de police générale.

3 catégories de personnes publiques : Etat, départements et communes.



      1. Pour l'Etat



Au sommet = le PM.

Fondement juridique : CE, 1919, « LABONNE » : le PR avait pris un règlement de police pour édicter le premier code de la route. Mais aucun texte ne l'habilitait ainsi à exercer la police générale.

Règlement jugé légal : le CE estime que le PR a un pouvoir réglementaire autonome en matière de police administrative générale. Autonome par rapport à la loi car il n'est pas prévu par un texte.

A l'époque, c'est le PR qui avait le pouvoir exécutif. Des arrêts du CE en tirent une conséquence : la jurisprudence LABONNE est maintenue mais avec une petite modification, c'est désormais le PM qui a un pouvoir réglementaire autonome en matière de police administrative.

Vème Rép. : les choses n'ont pas changé, le PM est le chef de l'exécutif.

Autre problème : Art.34 et 37C° : est-ce que le pouvoir réglementaire autonome en matière de police générale créée par l'arrêt LABONNE est le même que celui de l'art.37C°?

Le CE a répondu NON dans CE Sect., 1978, « UNION DES CHAMBRES SYNDICALES D'AFFICHAGE ».

Si on avait dit que c'était pareil, on en aurait déduit que le pouvoir réglementaire de l'arrêt LABONNE ne pouvait pas porter atteinte aux libertés publiques car elle relève de l'art.34C°.

Une mesure de police générale limite presque toujours une liberté publique.

Le CC° a repris l'arrêt du CE en 1987, « CODE RURAL ».

Après le PM, le PR en dispose toujours mais dans des cas assez rares : quand la mesure de police générale est prise en conseil des ministres car elles sont réputées être des décrets du PR.

Ensuite, il y a le préfet, cité dans le code générale des collectivités territoriales, 3 cas :

  • Police de la circulation sur les routes nationales en dehors des agglomérations.
  • Police des manifestations occasionnelles dans les communes à police d'Etat.
  • Police exercée simultanément sur le territoire d'au moins 2 communes. EX : CE, 1991, « COMMUNE DE NARBONNE » : le préfet interdit certains usages de l'eau dans son département en période de sécheresse.

Enfin, il y a le maire : il peut lui aussi être une autorité de police générale au nom de l'Etat. Hypothèse dans laquelle les maires assurent l'exécution des mesures de sûreté générale prescrites par le gouvernement.



      1. Pour les départements



L'autorité de police générale pour les départements = président du conseil général depuis la loi de décentralisation de 1982.

Police de circulation sur les routes départementales en dehors des agglomérations. Procédure qui permet au préfet d'intervenir à sa place : en cas de carence. Lorsque le président du conseil général ne fait rien, le préfet peut se substituer à lui après mise en demeure. Dans cette hypothèse, le préfet agit au nom du département et non plus au nom de l'Etat.



      1. Pour les communes

a. Le principe



Dans les communes normales, l'autorité de police générale est le maire. C'est une très vieille solution qui trouve son origine dans la loi du 05 avril 1884. Solution reprise par l'art.L.2112.2 du code des collectivités territoriales. Le conseil municipal n'a aucune compétence en matière de police administrative générale.

La police administrative générale des maire est appelée la police municipale.

Ex : Les maires peuvent interdire des réunions (dans les conditions prévues dans l'arrêt BENJAMIN), pouvoir de réglementer la circulation sur les routes communales, de réglementer la circulation sur la portion des routes départementales et nationales situées à l'intérieur des agglomérations, police des baignades et des activités nautiques qui va jusqu'à 300m du rivage...

En cas de carence du maire, le préfet peut se substituer à lui. Dans ce cas, le préfet agit pour le compte de la commune et non plus de l'Etat.



b. L'exception des communes à police d'Etat



2 types de personnels de police en France : la police municipale et la police d'Etat.

On trouve cette police d'Etat dans les villes de plus de 10 000 habitants. La police municipale et la police étatique cohabitent. Dans ces communes, il y a une légère diminution des pouvoirs de police du maire au profit du préfet.

On donne au préfet une partie de la police de tranquillité : police des manifestations occasionnelles, police des tumultes dans les lieux publics, police de tapage nocturne.

Le maire garde tout le reste donc 4 composantes de l'ordre public et une partie de la tranquillité (police des manifestations traditionnelles).

Idée = les troubles ordinaires restent au maire, les troubles les plus importants sont transférés au préfet.



      1. L'exception parisienne



Paris = siège des institutions. On craint donc des risques de coup d'Etat. On craint qu'un maire qui aurait tous les pouvoirs de police des autres maires puisse faciliter un coup d'Etat. Régime spécial à Paris que l'on doit à Napoléon Bonaparte par un arrêté de 1800 : le pouvoir de police est confié à une autorité spéciale qui n'existe qu'à Paris, le préfet de police. Ce préfet n'a que des pouvoir de police.

Jusqu'en 1977, il n'y avait pas de maire à Paris. En 1977, on a décidé de créer un maire de Paris. Depuis 1977, le CGCT a organisé la répartition des pouvoirs de police entre le maire et le préfet de police.

Le maire a 3 compétences :

  • Police des foires et des marchés
  • Salubrité des voies publiques
  • Police de la circulation routière (depuis une loi du 27 février 2002) sauf sur certains axes sensibles (autour de l'AN, Sénat,...)

Le préfet de police a tout le reste (manifestations, circulation sur les axes sensibles,...).

EX : CE Ord., 2007, « MINISTRE DE L'INTERIEUR vs ASSO SOLIDARITE DES FRANCAIS » : le préfet de police a interdit de distribuer sur la voie publique pour les sans abris de la soupe au cochon. Cette interdiction est-elle légale? OUI car on estime qu'il y a une discrimination volontaire envers les juifs et les musulmans.



      1. Le cas particulier des EPCI à fiscalité propre



= Établissement Public de Coopération Intercommunal. Ne sont visés que ceux qui ont leur fiscalité propre. Il s'agit principalement des communautés urbaines, communautés d'agglomération, communauté de communes.

Loi 13 août 2004 : permet aux maires des communes concernées, s'ils le veulent, de transférer au président de l'EPCI leur pouvoir de police dans 5 domaines :

  • La circulation et le stationnement
  • L'assainissement
  • Les déchets
  • Les gens du voyage
  • Manifestations culturelles et sportives

Avantage = Cela renforce l'intercommunalité.

Inconvénients = cela pose des délicats problèmes de partage de compétence.

Elle enlève aux maires leur pouvoir de police donc ce ne sont plus des acteurs privilégiés de la sécurité.



§2. La concurrence des pouvoirs de police administrative

A) La concurrence entre les pouvoirs de police générale



2 règles :

  • Une autorité inférieure ne peut pas prendre une mesure moins rigoureuse que celle prise par l'autorité supérieure.

EX : Décret du PM de 1990 qui interdit d'aller à plus de 50km/h dans les agglomérations. Un maire ne peut pas relever la limite maximum dans les agglomérations.

  • L'autorité inférieure peut prendre une mesure plus rigoureuse que l'autorité supérieure pour tenir compte de circonstances locales.

EX : un maire peut décider, dans certaines portions de l'agglomération, selon le danger, d'imposer une limitation de vitesse plus stricte. Règle posée par CE, 1902, « COMMUNE DE NERISSE LES BAINS » : un préfet avait interdit les jeux d'argent dans son département sauf dans les stations thermales. Un maire décide de les interdire aussi dans sa station thermale. C'est valable car il s'agit d'une mesure plus rigoureuse.



B) La concurrence entre police générale et police spéciale



2 principes :

  • Une police spéciale n'empêche pas la police générale de fonctionner quand les 2 polices poursuivent des buts différents. Pas le même but donc elles peuvent coexister.

EX : CE, 1959, « SOCIETE DES FILMS LUTETIA » : on reconnaît que deux autorités peuvent interdire les films : le ministre de la culture (police spéciale du cinéma) mais aussi le maire sur le fondement de sa police générale. Pou le maire = ordre public, pour le ministre = tout motif d'intérêt général.

CE, 1978, « UNION DES SYNDICATS D'AFFICHAGE ET DE PUBLICITES EXTERIEURES » : 2 autorités peuvent interdire les affiches : le préfet (police spéciale = esthétique et protection de l'environnement) et le maire (police générale = ordre public).

  • La police spéciale empêche la police générale de fonctionner quand elles poursuivent le même but.

EX : CE, 1986, « SOCIETE PEC-ENGINEERING » : police des installations classées (établissements dangereux confiés au préfet). Cette police interdit au maire d'utiliser sa police générale pour réglementer les installations classées sauf urgence.

CAA Lyon, 2005, « COMMUNE DE MENAT » : police spéciale = police des OMG. L'arrêt dit que la police des OMG qui a un but de sécurité fait obstacle à la police générale du maire.



      1. La concurrence entre les polices spéciales



Les empiètements sont rares car elles sont précises

En matière d'urbanisme, la police de l'urbanisme appartient au maire : il consiste à délivrer le permis de construire. Une seconde police spéciale appartient au préfet = police des établissements publics (donner l'autorisation d'ouverture au public).

Les empiètements sont légaux quand ils sont prévus dans des textes.

EX : CE, 1977, « NUNGESSER » : 2 autorités sont compétentes pour mettre en fourrière les chats et chiens errants : les préfets (police de la rage) et le maire (police de la divagation des chiens et chats).



Section 3 : Le régime juridique des mesures de police administrative

§1. Des mesures contraignantes



La police administrative est une activité de prescription = consiste à imposer des mesures. Activité qui est donc autoritaire par nature.

Les mesures de police sont contraignantes par leur contenu mais aussi par leurs effets.



A) Par leur contenu



Les mesures de police peuvent réglementer, interdire, autoriser, ordonner, fermer, enfermer, hospitaliser d'office, expulser hors de la France (étrangers dangereux), tuer (chiens dangereux).



B) Par leurs effets



Elles peuvent créer des droits pour le passé mais ne peuvent pas créer de droit acquis pour l'avenir.

L'administration est toujours libre de les abroger. Cela est valable pour tous les actes de police qu'ils soient réglementaires ou individuels.



§2. Des mesures soumises à certaines contraintes

A) Elles doivent respecter les libertés publiques



3 règles :

  • Il est interdit de soumettre les libertés publiques à un régime d'autorisation ou de déclaration préalable. Seule la loi peut le faire, art.34C°.

EX : CE Ass., 1951, « DAUDIGNAC » : un maire avait tenté de soumettre à son autorisation préalable l'exercice de la profession de photographe. Atteinte à la liberté de commerce et d'industrie donc illégal.

CE, 1927, « CARRIER » : un maire avait essayé d'obliger les touristes à déclarer en mairie leur promenade en montagne au préalable.

  • Il n'est possible de porter atteinte aux libertés publiques que dans la mesure du strict nécessaire.

EX : « BENJAMIN »

  • Il est interdit d'édicter des interdictions 'générales et absolues'. La jurisprudence dit que les interdictions trop vastes anéantissent les libertés. On admet en principe jamais les interdictions générales et absolues.

EX : CE Sect., 1984, « PREFET DE POLICE vs GUEZ » : dans cette affaire, le préfet de police avait interdit toute attraction dans touts les rues et voies piétonnes de Paris. Cela porte atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie. Interdiction trop générale et absolue.

Dans des cas très rare, le CE admet l'interdiction général et absolue quand il est impossible de faire autrement.



B) Les mesures de police doivent prendre en compte le droit de la concurrence



C'est une règle récente posé par CE avis, 2000, « SOCIETE L ET P PUBLICITE ». La police administrative doit désormais respecter le droit de la concurrence.

Faits dans cet avis : un maire voulait réglementer l'affichage et le CE a considéré qu'il pouvait le faire mais à condition de ne pas créer par sa réglementation une position dominante injustifiée au profit d'une société.

Transposition de la jurisprudence « MILLIONS ET MARAIS » qui concernait les SP. Mais comme la police administrative est un SP...



      1. L'obligation d'agir



Dans 4 cas, l'autorité de police est obligée d'agir :

  • Obligation d'édicter un règlement de police : lorsqu'un règlement de police est nécessaire pour faire cesser un trouble grave à l'ordre public, l'autorité de police est obligée de le prendre. Si elle ne le fait pas, elle engage sa responsabilité. CE Sect., 1959, « DOUBLET ».
  • Obligation d'appliquer un règlement de police : quand un règlement de police existe, il faut l'appliquer. CE Sect., 1962, « DOUBLET ».
  • Obligation de prendre un acte individuel de police : quand un acte individuel de police est nécessaire pour faire cesser un trouble grave à l'ordre public, l'autorité de police est obligée de le prendre. CE, 1973, « DEMOISELLE AMBRIGOT ».
  • Obligation d'exécuter un acte matériel de police : lorsqu'une activité matérielle de police est nécessaire pour faire cesser un trouble grave à l'ordre public, l'administration doit agir. CE Sect., 1983, « VEUVE LEFEBVRE » : M. Lefebvre s'est noyé dans un lac car il n'y avait pas de cabine téléphonique à proximité pour appeler les pompiers.



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