5.08.2012

Fin du cours de droit des affaires


  1. La publicité de la vente



En cas de vente clandestine, les créanciers ordinaires du vendeur risquent de ne pas être payés alors que les créanciers privilégiés sont protégés contre la vente du fond de commerce par leur droit de suite et de préférence. Les créanciers chirographaires (= ordinaires) n’ont qu’un droit de gage général sur les biens de leur débiteur. Or leur débiteur peut être tenté de faire échapper certains de ces biens à leur emprise potentielle en organisant son insolvabilité soit en vendant son fond à un prix dérisoire, soit en mentionnant un prix dérisoire et en faisant une contre lettre.

C’est pourquoi la loi a organisé la protection des créances du vendeur par le biais de la publicité.



  1. La publicité de la vente



La vente doit faire l’objet d’une publicité légale. Elle doit être faite par l’acquéreur. La vente doit d’abord être enregistrée auprès des autorités fiscales puis l’art.L141-12Ccom impose la publication du contrat dans les 15 jours suivants la vente dans le JAL et la mention d’un avis au BODACC dans les 15 jours suivants la publication au JAL.

La publication au BODACC incombe au greffier du TC informé de la vente par l’acquéreur qui lui demande son inscription au RCS.

La publication reprend les éléments essentiels de l’acte de vente.

EX : date de la cession de l’acte, identité des anciens propriétaires, la nature et le siège du fond, le prix du fond (au sens large), les délais pour faire opposition.

A défaut de publicité, la vente est valable mais le paiement du prix est inopposable aux créanciers du vendeur.

Si le prix est versé entre les mains du vendeur en l’absence de toute publicité ou avant l’expiration du délai ouvert aux créances, le paiement sera inopposable aux créanciers.

Si les mentions sont inexactes, l’inopposabilité ne peut être prononcée que si l’erreur porte sur un élément essentiel de la vente et nuie gravement à l’information des créanciers.

La publicité permet aux créanciers ordinaires du vendeur d’être au courant de la vente pour pouvoir défendre leurs droits sur le prix de cession.



  1. L’opposition au paiement



Averti de la vente par la publicité, les créanciers ordinaires du vendeur peuvent faire opposition au paiement du prix de vente par acte d’huissier dans les 10 jours suivants la dernière publication au BODACC.

Les créanciers privilégiés peuvent se dispenser de l’opposition.

L’opposition bloque l’argnt dans les mains de l’acquéreur et empêche que le prix soit versé au vendeur = le prix d’achat est consigné dans les mains de l’intermédiaire dont le nom figure au JAL pendant le délai pour faire opposition voir plus si un créancier fait opposition.

L’opposition ne confère aucun privilège au créancier opposant et ne lui donne pas de droit de préférence.

Principal effet = prolonger l’indisponibilité légale du prix de cession.

L’opposition doit indiquer la cause et le montant de la créance. Si l’opposition est valable, le prix de la vente sera réparti entre tous les créanciers.

Si l’acquéreur respecte ce délai, il est assuré d’avoir un fond libre de toutes inscriptions.

A la demande du vendeur, le TGI peut ordonner en référé la main levée des oppositions affectées d’un vice de forme ou sans cause.

De même, à l’expiration du délai de 10 jours, le vendeur peut demander le cantonnement des sommes dues au créancier opposant si celles-ci sont inférieures au prix total de fond.

L’autorisation demandée ne sera accordée par le juge que si le vendeur atteste qu’il n’y a pas d’autres créanciers.



  1. Le droit de surenchère des créanciers



Si, après avoir pris connaissance de l’acte de vente, les créanciers opposants ou inscrits sur le fond estiment que le prix de vente est insuffisant pours les désintéresser, ils peuvent former une surenchère pendant un délai de 20 jours à compter de la publication au BODACC.

Tant que le délai n’est pas expiré, le prix de cession n’est pas définitif et ne doit pas être remis au vendeur ou à ses créanciers.

Les créanciers surenchérisseurs espèrent que la vente du fond aux enchères publiques permettra d’obtenir un prix d’adjudication plus important et augmentera leurs chances d’être payés.

Les créanciers opposants peuvent faire une surenchère d’1/6ème du prix de cession des éléments incorporels. Les créanciers opposants doivent mettre le fond aux enchères publiques en s’engageant à se porter acquéreur pour le prix initial + 1/6ème de la valeur des éléments incorporels si aucune offre ne se fait.

Les créanciers inscrits bénéficient d’un régime plus favorable. Ils peuvent faire nue surenchère sans avoir besoin de faire une opposition préalable et leur surenchère sera seulement d’1/10ème de la valeur des éléments incorporels.











II/ Les effets de la vente du fond

  1. Les obligations du vendeur

  1. L’obligation de délivrance



Le vendeur doit mettre à la disposition de l’acheteur tous les éléments du fond énumérés dans le contrat. Cela suppose que le vendeur présente la clientèle à l’acquéreur et qu’il tienne les livres de comptes des 3 dernières années à sa disposition.

Cette dernière obligation permet à l’acquéreur de vérifier le C.A. et donc d’exercer en temps utile l’action en garantie de non-conformité. La mise en possession de l’acquéreur des éléments du fond est indépendante du transfert de propriété qui s’opére, sauf clause contraire, automatiquement au jour de la conclusion du contrat.

La mise en possession diffère selon la nature de l’élément concerné.



  1. Les obligations de garantie
    1. La garantie d’éviction



= Le vendeur doit assurer à l’acquéreur une possession paisible de la chose vendue.

Cette garantie résulte de l’art.1626CC selon lequel « le vendeur est obligé de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de l’objet vendu ».

L’action en garantie légale d’éviction est attachée au fond donc elle appartient à l’acquéreur et se transmet avec le fond au profit du sous acquéreur.

Si le vendeur méconnaît cette obligation, il peut être condamner à verser des DI voire à cesser son activité et l’acquéreur peut demander la résolution de la vente.

Le vendeur doit protéger l’acquéreur contre tout détournement de clientèle que le détournement émane de lui-même ou d’un tiers. En vertu de la garantie de son fait personnel, le vendeur doit grantir l’acheteur contre les troubles de droit et de fait émanant de lui-même.

En matière de vente de fond de commerce, le vendeur est tenu au titre de la garantie légale d’une obligation légale de non concurrence.

En vertu de cette obligation, le vendeur ne peut pas se rétablir à proximité du fond ou plus largement faire concurrence à son acheteur.

Cette obligation légale de non concurrence étant trop imprécise, les parties insérent souvent dans le contrat une clause de non concurrence.

Ce type de clause contractuelle a pour objet de préciser les contours de l’obligation de non concurrence. Il est souvent mentionné l’étendue géographique et la durée de l’obligation. Pour que la clause soit valable, elle doit être limitée dans le temps et dans l’espace et ne vaut que pour le genre de commerce qui fait l’objet du fond vendu.

Ces clauses de non concurrence interdisent le rétablissement du vendeur comme commerçant mais aussi les autres formules qui auraient le même résultat. L’ouverture d’un commerce similaire par une société dont le vendeur serait l’associé unique ou majoritaire contrevient à la clause de non concurrence. L’obligation de non concurrence peut être invoquée non seulement par l’acheteur mais aussi par le sous acquéreur si le fond est revendu avant l’expiration du délai de non rétablissement. Toutefois, la clause n’est opposable au cessionnaire du fond qu’à la condition d’avoir été insérée dans l’acte de cession et expressément acceptée par eux. La Ccass. admet cependant la constitution d’une servitude de non concurrence qui elle, se transmet de droit avec le fond. Dans, ch.com., 14 avril 1992, la Ccass. a jugé que l’existence d’une clause de non concurrence n’exclue pas la garantie légale. A l’expiration de la clause, l’acquéreur peut toujours se prévaloir de la garantie d’éviction.

Le vendeur doit aussi garantir l’acquéreur contre les actions en revendication de propriété émanant de tiers. Le vendeur ne garanti que les troubles de droit émanant de tiers.



    1. La garantie due en raison de l’inexactitude des mentions de l’acte de vente



L’art. L141-3 du Ccom. dispose que le vendeur doit garantir à l’acquéreur l’exactitude des mentions de l’acte de vente. En cas d’inexactitude, l’acheteur peut demander soit la résolution de la vente, soit une réduction du prix à condition de prouver que l’inexactitude l’a induit en erreur sur la valeur du fond. Cette action en garantie doit être intentée dans le délai d’un an à compter de la vente et plus exactement à compter de la prise en possession du fond.



    1. La garantie des vices cachés



Le vendeur doit aussi garantir l’acquéreur contre les vices cachés c’est-à-dire les défauts qui ne sont pas connus de l’acheteur avant la livraison. La jurisprudence exige que l’acheteur n’ait pas pu déceler le vice.

La garantie est celle du droit commun avec l’art. 1641 du CC = le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine ou qui diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix s’il les avait connues.

La garantie n’est pas due pour tous les défauts cachés. En matière de vente de fond de commerce, le vice caché peut être l’absence de licence nécessaire à l’exploitation ou la péremption d’un brevet. L’acquéreur victime d’un vice caché doit agir dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Il a le choix entre :

  • Restituer le fond et en récupérer le prix : c’est l’action rédhibitoire.
  • Une diminution du prix : c’est l’action estimatoire.

Les contractants peuvent faire varier l’ampleur de la garantie.

EX : l’acquéreur peut s’il est en position de force, obtenir des garanties supplémentaires. De son côté, le vendeur ne peut pas éluder la garantie en insérant dans le contrat, une clause limitative ou exonératoire de garantie car ces clauses élaborées en faveur d’un professionnel sont nulles.



  1. Les obligations de l’acheteur

  1. Le payement du prix



C’est l’obligation essentielle de l’acheteur. Le prix est librement fixé par les parties. Il suffit qu’il soit déterminable. S’il paie comptant, l’acheteur doit toutefois attendre un délai de 10 jours suivants la vente. Ce délai est celui pendant lequel les créanciers du vendeur peuvent faire opposition au paiement. L’application du prix donne parfois lieu à des pratiques frauduleuses. En effet, pour éviter de payer des droits de mutation trop élevés, les contractants dissimulent parfois, une partie du prix dans un acte secret. Plusieurs dispositions légales visent à lutter contre ses contre-lettres :

  • L’art.1840 du CGI repris à l’art. 1321 du CC. Cet article dispose que les contre-lettres qui stipulent un supplément de prix sont nulles. Pour la Ccass., la nullité ne s’applique qu’à la contre-lettre. L’acheteur peut invoquer cette nullité pour ne payer que le prix apparent.
  • La loi autorise l’administration fiscale, dans l’art.1827 du CGI, à redresser le prix de vente stipuler dans l’acte, si celui-ci est insuffisant par rapport à la valeur marchande réelle du fond.
  • L’administration peut aussi préempter le fond proposer à l’acquéreur en payant le prix convenu dans l’acte apparent majoré d’un dixième.
  • Les créanciers du vendeur qui trouveraient le prix de vente trop insuffisant peuvent former une surenchère.



  1. La garantie du prix

    1. Le privilège du vendeur du fond



Pour protéger le vendeur contre l’insolvabilité de l’acheteur, en cas de paiement à terme, l’art. L141-5 du CCom lui accorde un privilège spécifique. Ce privilège doit être inscrit à peine de nullité absolue, dans les 15 jours suivants la date de la vente, sur un registre spécial tenu par le greffe du TC. L’inscription prise dans le délai, est rétroactive au jour de la vente. Peu importe donc que pendant le délai de 15 jours, l’acheteur soit en cessation de paiement ou revende son fond. Si le fond vendu comprend des brevets, des marques, modèles ou dessins, une inscription spéciale doit être prise à l’INPI. Le privilège est efficace pendant 10 ans à compter de la vente.

L’art. L141-5 du Ccom prévoit que le privilège ne porte que sur les éléments du fond énumérés dans la vente. A défaut d’énumérations précises, le privilège ne porte que sur les éléments incorporels principaux qui sont la clientèle, une marque, un droit au bail. Lorsque des prix distincts sont établis pour les éléments incorporels, le matériel et la marchandise, le privilège s’exerce distinctement sur chacun de ces prix. L’art. L141-5 dispose que les acomptes versés par l’acheteur, tous les mois, après la vente, s’imputent d’abord sur le prix des marchandises, puis sur le prix du matériel et enfin, sur le prix des éléments incorporels. Cette règle d’imputation ne concerne pas la partie du prix payée comptant. Les parties sont libres d’affecter le paiement comptant comme elles le veulent.

Huit jours après une sommation de payer restée sans effet, le vendeur peut assigner l’acheteur devant le TC pour qu’il ordonne la vente aux enchères des éléments du fond. Dans ce cas, le privilège du vendeur s’exerce distinctement sur les prix respectifs de revente aux enchères des marchandises, du matériel et des éléments incorporels du fond qui restent.

Par exemple, un fond est vendu 100 000 euros payables en 10 fois. Il y a 20 000 euros de marchandises, 30 000 euros de matériels et 50 000 euros d’éléments incorporels. Il y a un paiement comptant de 25 000 dont 20 000 euros de marchandises et 5 000 euros de matériel. Il reste 75 000 euros à rembourser. On imagine que l’acquéreur met la clé sous la porte au bout de 2 mois et ne peut pas payer le solde. Le vendeur saisit le TC qui ordonne la mise en vente des éléments du fond. La vente aux enchères rapporte pour les marchandises, 25 000 euros, pour le matériel, 30 000 euros et pour les éléments incorporels, 20 000 euros soit 75 000 euros. Le créancier récupère 25 000 euros sur le matériel et 20 000 euros sur les éléments incorporels. Il récupère donc 45 000 euros.

Le privilège du vendeur du fond lui assure deux prérogatives :

- Un droit de préférence qui lui permet d’être payé par priorité sur le prix tiré de la revente aux enchères du fond si l’acheteur ne le paie pas.

- Un droit de suite qui lui permet de suivre le fond en quelques mains qu’il passe. Le sous-acquéreur, averti par somation peut le désintéresser.

L’efficacité de ce privilège est médiocre car en cas de vente aux enchères du fond, il existe de fortes probabilités pour que les éléments incorporels comme la clientèle n’existent plus.



    1. L’action résolutoire



Le vendeur impayé dispose de l’exception d’inexécution et du droit de demander la résolution de la vente. En cas de non paiement, il peut donc reprendre son fond moyennant la restitution des acomptes perçus. Si le fond a subit une moins value, le vendeur pourra en obtenir le remboursement en prouvant la faute de son acheteur. La résolution de la vente n’est pas possible en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’acheteur.

L’exercice de l’action résolutoire suppose que le vendeur ait indiqué au moment de la publicité de son privilège, qu’il se réserve la faculté de demander la résolution de la vente. L’action en résolution n’est opposable aux tiers que si elle a été réservée lors de l’inscription du privilège et si ce privilège n’est pas éteint.



III/ Le nantissement du fond de commerce



Le propriétaire d’un fond de commerce peut le donner en garantie à ses créanciers par un nantissement. Il y a deux façons de voir les choses. Il s’agit d’un gage « sans dépossession » ou « d’une hypothèque mobilière ». L’intérêt du nantissement est de permettre au commerçant de conserver son fond tout en accordant une garantie à son prêteur. La dépossession est remplacée par une publicité. Cette sûreté mobilière est régie par les articles L142-1 et suivants du CCom.



  1. Le nantissement du fond de commerce

  1. Les deux types de nantissements

    1. Le nantissement contractuel



Ce nantissement résulte d’un contrat passé entre un créancier et le débiteur commerçant. Le nantissement est un acte grave si bien que si le fond est bien commun, le consentement des deux époux est nécessaire.



    1. L’assiette

Lart.L142-2 al. 1 énumère les éléments du fond susceptibles d’entrer dans le champ du nantissement. Il s’agit de l’enseigne, des noms commerciaux, du droit au bail, de la clientèle au sens large, du matériel, de l’outillage, des brevets, des marques, des dessins ou modèles.

L’art.L142-2 al.3, dans le silence, précise que le nantissement porte automatiquement sur les éléments du fond qui sont la clientèle, le nom commercial, l’enseigne et le cas échéant, le droit au bail. A défaut de précision, la clientèle et son élément principal de rattachement sont obligatoirement compris dans l’assiette du nantissement. A contrario, les parties peuvent exclure du nantissement, les éléments qui ne sont pas essentiels pour le ralliement de la clientèle.

En ce qui concerne les éléments corporels, il faut préciser que le matériel et l’outillage ne font partie du nantissement que si on les a mentionnés. En revanche, le nantissement ne peut jamais porter sur la marchandise. En ce qui concerne les éléments incorporels, les droits de propriété industrielle sont en principe exclus sauf clause contraire. Le nantissement est valable 10 ans. Il peut être renouvelé.



    1. Forme et publicité du nantissement



Le nantissement doit être conclu sous forme d’un acte écrit. L’inscription au registre des nantissements doit se faire dans les 15 jours de la conclusion du contrat sous peine de forclusion. Celui qui demande la nullité du nantissement doit faire preuve d’un préjudice. L’inscription prend effet à la date à laquelle elle est faite. En conséquence, la faillite du débiteur, pendant le délai antérieur à l’inscription, gêne le nantissement. Le rang des créanciers nantis est déterminé par la date de leur inscription.



    1. Le nantissement judiciaire



Il a été organisé par la loi du 12 novembre 1955 afin de protéger les créanciers du commerçant contre son insolvabilité menaçante. Le régime de ce nantissement a été modifié par la loi du 19 juillet 1991. la loi prévoit que « tout créancier d’un commerçant dont la créance paraît fondée dans son principe et qui justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement, peut solliciter du juge ou du Président du TC, l’autorisation de prendre une inscription provisoire de nantissement sur le fond de son débiteur ». Une fois l’autorisation obtenue par voie de requête, le créancier a trois mois pour prendre une inscription provisoire de nantissement au greffe du TC. Puis, dans le délai d’un mois, le créancier doit introduire une procédure au fond pour obtenir un titre exécutoire.

Si le titre exécutoire est obtenu, le créancier doit prendre une inscription définitive dans le délai de deux mois. Le nantissement définitif prend effet rétroactivement à la date de l’inscription provisoire. Le créancier n’a pas besoin de recourir au juge par voie de requête s’il a déjà un titre exécutoire ou s’il peut se prévaloir d’une décision de justice même non revêtu de la force exécutoire ou encore, s’il détient une créance constitutive d’un état exécutoire.



  1. Les effets du nantissement
    1. Les droits de suite et de préférence des créanciers nantis



Le nantissement, à la différence du privilège du vendeur, garantie indivisiblement la totalité de la créance sur la totalité des éléments du fond qu’il grève. L’intérêt de cette garantie réside dans le fait qu’elle ne comporte aucune réduction de son assiette, contrairement au privilège, au fur et à mesure des paiements. Tant qu’il n’est pas entièrement remboursé, le créancier conserve sa sûreté sur l’ensemble des effets mentionnés.

Le nantissement confère au créancier nanti :

  • Le droit de demander la vente forcée du fond : huit jours après une sommation de payer demeurée infructueuse, un créancier inscrit peut demander au TC d’ordonner la vente du fond aux enchères publiques par les soins d’un commissaire priseur ou d’un notaire.
  • Le créancier nanti a un droit de préférence : ce droit lui permet d’être payé avant les créanciers chirographaires sur le prix de la vente du fond. Ce droit joue aussi lorsque seul le droit au bail est cédé. Le vendeur privilégié passe avant les créanciers nantis et entre créanciers nantis, on tient compte de la date d’inscription de la sûreté. En cas de faillite, le créancier nanti subit les contraintes de la loi du 25 janvier 1985. En conséquence, les créanciers nantis passent avant les salariés et la sécurité sociale mais après le trésor public.
  • Le créancier nanti bénéficie d’un droit de suite qui lui permet de faire vendre le fond en quelques mains qu’il passe. Si une banque prend un nantissement sur un fond de commerce, le propriétaire le revend, la banque pourra saisir le fond de commerce du sous acquéreur et le faire vendre. Comme pour le privilège du vendeur du fond de commerce, le droit de suite du créancier lui permet de se faire payer par l’acquéreur du fond sur lequel porte son nantissement. Le créancier nanti n’a pas besoin de faire opposition à la vente car la loi a prévu une procédure de purge par laquelle l’acquéreur dégage le fond des inscriptions en versant au créancier nanti le prix d’achat convenu avec le vendeur. Pour éviter une sous évaluation du prix de cession du fond, le créancier inscrit peut faire une surenchère d’un dixième de la valeur des éléments incorporels du fond. Les créanciers nantis peuvent provoquer la mise aux enchères du fond et ils s’engagent, s’il n’y a pas d’acquéreur, à acheter le fond pour le prix de vente majoré d’un dixième de la valeur des éléments incorporels.



2.2.Les droits conservatoires des créanciers nantis



La loi confère au créancier nanti des droits conservatoires et oblige le commerçant (qui est leur débiteur) à les avertir dans les cas suivants :

  • Le déplacement du fond de commerce doit leur être notifié 15 jours à l’avance. A défaut, le débiteur subira la déchéance du terme et le créancier nanti peut faire vendre immédiatement le fond. A la suite de la notification du déplacement, les créanciers nantis doivent modifier leur inscription pour conserver leur sûreté sur le nouvel emplacement. A défaut, leur sûreté est inopposable au nouveau créancier. Si la notification est faite, les créanciers peuvent demander au TC la déchéance du terme si le déplacement du fond risque d’en diminuer la valeur.
  • La vente d’un élément isolé du fond est interdite sous peine de sanction pénale car cette cession peut entraîner la dépréciation du fond. Par ailleurs, si un créancier saisit un élément isolé du fond pour le vendre, il doit le notifier au créancier nanti dans un délai de 10 jours. Les créanciers nantis peuvent alors demander au TC d’ordonner la vente globale du fond.
  • La résiliation du bail doit être notifié au créancier inscrit. La résiliation du bail par le bailleur ne peut être prononcé qu’un mois après un commandement de payer resté infructueux. Pendant ce délai, les créanciers inscrits peuvent payer les loyers dus pour éviter la résiliation du bail. Ils seront alors subrogés dans le privilège du bailleur. L’absence de notification de la résiliation est sanctionnée par l’inopposabilité de la résiliation au créancier inscrit et éventuellement, des dommages et intérêts.
  • Le commerçant doit encore avertir le ou les créancier(s) nanti(s) dans les cas suivants :

  • En cas de résolution de la vente du fond par le vendeur
  • En cas de constitution d’un nantissement sur l’outillage ou le matériel d’équipement
  • En cas de demande de déspécialisation totale des locaux

Le nantissement du fond n’est pas une très bonne sûreté faute de droit de rétention et de faculté d’attribution d’un bien gagé. De plus, la sûreté ne vaut que pour le bien sur lequel elle est assise. Or, ce bien qu’est le fond de commerce peut perdre toute sa valeur en cas de difficulté financière. Cette sûreté est donc prise lorsqu’il n’y en n’a pas de meilleur et elle est surtout prise pour éviter qu’un autre créancier ne s’inscrive à la place de celui qui aurait pu le faire. Néanmoins, le nantissement présente un avantage : il permet au créancier inscrit d’être informé des actes réputés dangereux.



  1. Le nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement



Ce type de nantissement est codifié à l’article L525-1 et suivants du Code de commerce.



  1. Les conditions



Ce nantissement a pour but de faciliter la vente à crédit d’outillage et de matériel puisqu’il permet à l’acheteur de donner en garantie une sûreté au créancier inscrit. Ce nantissement est destiné à garantir le paiement du solde du prix tout en conservant l’usage de l’outillage ou du matériel ce qui implique que ce type de nantissement ne peut être consenti qu’au vendeur du matériel ou à celui qui prête les fonds nécessaires à l’achat. Le nantissement doit être constaté par acte authentique ou sous seing privé dans les deux mois suivants la vente et l’acte doit être enregistré dans les 15 jours suivants son établissement. Le créancier nanti sur l’outillage ou le matériel doit notifier par acte extra judiciaire, une copie de l’acte de nantissement au créancier inscrit sur le fond afin de leur rendre opposable.



  1. Les effets



Le créancier nanti est protégé contre le déplacement du fond ou la résiliation du bail mais en plus, le matériel grevé ne peut pas faire l’objet d’un autre nantissement sans son autorisation. Le créancier nanti bénéficie d’un droit de préférence qui lui permet de primer les créanciers nantis sur le fond. Il a aussi un droit de suite sur l’outillage ou le matériel. Ce droit de suite suppose le respect de certaines règles : il ne peut s’exercer que s’il a apposé sur le matériel ou l’outillage, une plaque indiquant le lieu, la date et le numéro d’inscription de son privilège.



III/ La location gérance du fond de commerce



La location gérance ou gérance libre est un contrat par lequel le propriétaire d’un fond de commerce en confère l’exploitation à un tiers appelé locataire gérant ou gérant libre moyennant une redevance. Le locataire gérant exploite le fond pour son propre compte et à ses risques. La qualité de commerçant passe donc du propriétaire du fond au gérant. L’élément essentiel de la location gérance est la location d’une clientèle.

L’intérêt du contrat diffère selon que l’on se place du point de vue du propriétaire ou du locataire du fond. Au départ, ce contrat était utilisé par des commerçants qui voulaient prendre leur retraite tout en désirant conserver leur fond de commerce. Pendant la seconde guerre mondiale, la location gérance a été employée comme un moyen de placement voire de spéculation par des personnes qui n’avaient jamais été commerçante. Cette pratique contribua à la hausse des prix des fonds de commerce. D’où la loi de 1953. Aujourd’hui, le but de la location gérance est de faire face à une situation passagère ou de procéder au placement d’un capital. L’intérêt de la location est de permettre à une personne qui ne veut plus ou ne peut plus être commerçante, de conserver le fond dans son patrimoine tout en conservant sa substance. Pour le locataire gérant, le contrat lui permet d’exploiter un fond qui ne lui appartient pas sans être dans une situation de subordination salariée. De plus, ce contrat lui permet d’exploiter un fond sans investissement au départ. Juridiquement, le contrat de location gérance est un bail mobilier.

En 1953, le législateur est intervenu par plusieurs décrets. Ces décrets soumirent la location gérance à des conditions très rigoureuses si bien que la location gérance avait pratiquement disparue. Le législateur est alors, à nouveau, intervenu par la loi du 20 mars 1956 qui a assoupli le régime de la location gérance. Cette loi d’ordre public s’applique aux fonds de commerce et aux fonds artisanaux. Cette loi se borne à fixer un certain nombre de conditions et d’effets du contrat qui, pour le reste, est soumis au droit commun des contrats. Aujourd’hui, on retrouve cette loi sous l’article L144-1 et suivants du Code de commerce.



  1. Les conditions de la location gérance

  1. Les conditions de fond



Comme toute convention, le contrat de location gérance doit respecter les conditions de validité du droit commun des contrats. En ce qui concerne l’objet du contrat, il ne peut y avoir de location gérance que s’il existe une clientèle réelle et certaine. Le fait de louer un local aménagé ne constitue pas un contrat de location gérance mais plus probablement, un bail commercial.



    1. Les conditions à remplir par le bailleur



La mise en location gérance d’un fond est un acte d’administration. Il en résulte que même si le fond de commerce est un bien commun, le commerçant n’a pas besoin de l’autorisation de son conjoint pour le donner en location gérance. Toutefois, l’article L121-5 du Code de commerce exige l’accord du conjoint si celui-ci participe à l’exploitation du fond. Afin d’éviter la spéculation, les articles 144-1 et suivants posent certaines conditions. Pour pouvoir louer un fond, le bailleur doit respecter les conditions suivantes :

  • Le bailleur ne doit pas être frappé du droit de déchéance donc interdit de faire le commerce. La déchéance oblige le commerçant à vendre son fond.
  • L’article L144-3 exige que le loueur ait exploité son fond de commerce pendant au moins deux ans. Cette obligation d’une exploitation personnelle du fond garantie l’existence d’une véritable clientèle et limite les risques spéculatifs. Cette condition d’exploitation personnelle connaît de nombreuses dispenses légales et judiciaires. Cette obligation d’exploitation ne s’applique pas au fond donné en location gérance par l’Etat ou les collectivités locales ou aux établissements de crédit pour permettre à ces établissements de pratiquer le crédit bail sur le fond de commerce. Sont encore dispensés de cette condition d’exploitation personnelle, les propriétaires qui sont frappés d’incapacité (majeurs sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice) ou les héritiers du commerçant décédé même si aucune incapacité ou incompatibilité ne les empêche d’exercer eux-mêmes. La liste des dispenses a été étendue au conjoint attributaire du fond à la dissolution du régime matrimonial, si ce conjoint a participé à l’exploitation pendant au moins deux ans avant la mise en location gérance. Les dispenses s’appliquent aussi aux mandataires de justice chargés de l’administration du fond. Une autre série d’exceptions concerne certains types de commerces. Il en va ainsi pour les établissements de spectacle tel que le cinéma, le théâtre, le cirque. La loi ajoute encore qu’il n’est pas nécessaire de respecter le délai de deux ans lorsque le commerçant loue son fond afin d’assurer, sous contrat d’exclusivité, l’écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par lui-même. Cette liste légale, bien que longue, est en pratique insuffisante. Les dispenses judiciaires sont prévues par l’article L144-4. Le délai de deux ans peut être réduit ou supprimé par ordonnance du Président du TGI rendue sur simple requête si le propriétaire justifie qu’il est dans l’impossibilité d’exploiter personnellement le fond. Les juges sont de plus en plus laxistes pour accorder la dispense. Néanmoins, il faut toujours passer devant le juge. En l’absence de dispense judiciaire préalable à la conclusion du contrat, la location gérance est nulle. Avant, il fallait également pouvoir justifier de la qualité de commerçant pendant 7 ans. Depuis 2004, le loueur n’a plus besoin de cela.

Le non respect de ses conditions de fond est sanctionné par la nullité absolue du contrat de location gérance. Toutefois, la nullité ne peut pas être opposée par les parties aux tiers. Par exemple, la nullité du contrat de location gérance ne peut pas être opposée aux créanciers du gérant. Une seconde sanction consiste dans l’impossibilité pour le loueur de se prévaloir du statut des baux commerciaux. En cas d’annulation du contrat de location gérance (non rétroactive), si le fond de commerce comporte un droit au bail, le propriétaire du fond est déchu du droit de se prévaloir du renouvellement automatique du bail du local.



    1. Les conditions à remplir par le gérant



Le locataire gérant doit avoir la capacité de faire le commerce. La location gérance étant un contrat de louage de choses, la stipulation d’un loyer devrait être considérée comme une condition de validité du contrat. Toutefois, la jurisprudence a jugé que l’exploitation d’un fond aux risques et périls du locataire suffit pour caractériser l’existence d’un contrat de location gérance.



  1. Les conditions de forme



La location gérance est un contrat consensuel ce qui veut dire que le contrat est parfait dès lors qu’il y a accord sur la chose et le prix. En pratique, on rédige un acte afin d’informer les tiers sur la qualité de locataire de l’exploitant du fond. En effet, pour rendre la location opposable aux tiers, il faut publier le contrat et la publication au JAL (Journal des Annonces Légales) doit avoir lieu dans les 15 jours de la conclusion du contrat. En outre, le locataire gérant doit s’inscrire au RCS en tant que locataire gérant et l’inscription mentionne l’existence du contrat de location gérance. La demande d’immatriculation doit indiquer le nom du bailleur (propriétaire du fond) et préciser la durée du contrat. De son côté, le bailleur doit se faire radier car il n’est plus commerçant. En cas de reconduction expresse du contrat, il faut l’indiquer au RCS. De même, la clause de tacite reconduction doit être publiée. Le non respect de la publicité n’est pas la nullité du contrat. L’article L144-7 du Code de commerce dispose que le non respect des conditions de forme entraîne la responsabilité solidaire du bailleur pour les dettes résultant de l’exploitation du fond pendant 6 mois.



  1. Les effets de la location gérance



Le contrat de location gérance dissocie la propriété du fond qui appartient au bailleur et l’exploitation de l’entreprise qui relève du gérant. Le propriétaire du fond perd la qualité de commerçant au profit du locataire gérant qui devient commerçant.










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